MPR et territoires

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Loi Rist et PPL Valletoux : la financiarisation masquée de la médecine

Dans la version finale de la loi Rist, l’accès direct aux Infirmières en pratique avancée (IPA) et aux masseurs-kinésithérapeutes (MK) est possible dans différentes structures d’exercice coordonné, hormis les CPTS. Pour les MK, le nombre de séances autorisées en accès direct est limité à huit. En revanche, pour les orthophonistes, l’accès direct est possible en CPTS si les modalités de prise en charge et de coordination sans prescription médicale sont inscrites dans le projet de santé. Nous avons déjà exposé les risques liés à la financiarisation : la suppression de la prescription médicale ne peut se concevoir sans une stratégie diagnostique et thérapeutique coordonnée et formalisée par des programmes de soins médicalisés, ainsi qu’une formation adaptée, afin de ne pas laisser les interventions à la main de logiques de gestion purement financières de survie ou de rentabilité.

Bien que l’encadrement de la rémunération de l’intérim soit nécessaire, l’application du volet Intérim de la loi Rist de 2021 va impacter le fonctionnement quotidien des établissements à l’heure où certains SSR sont menacés de fermeture. Quel sera l’impact sur les lits et places de MPR sachant que par exemple, aujourd’hui à l’AP-HP, 21,3% des lits de SSR sont fermés ?

Dans les établissements, les difficultés se sont accumulées pendant des années. Les réunions portant sur l’attractivité des carrières hospitalières, la revalorisation de la carrière des praticiens hospitaliers et la permanence des soins en établissement de santé ont été reportées. Pourtant, l’ensemble des intersyndicales représentant les praticiens hospitaliers et hospitalo-universitaires exigent de :

  • Relancer les négociations prévues les 15 et 16 mai améliorant les carrières des praticiens de manière juste et équitable ;
  • Régler l’injustice sur les retraites des hospitalo-universitaires en utilisant les avancées du rapport Uzan ;
  • Trouver ensemble la solution pour gommer les effets délétères de la fusion des 4 premiers échelons qui a généré l’équivalent d’une perte de 4 années d’ancienneté pour tous les praticiens titulaires nommés avant octobre 2022 ;
  • Pérenniser les mesures sur la permanence des soins en revalorisant les gardes et les astreintes.

La proposition de loi de M. Frédéric Valletoux inquiète alors que les négociations conventionnelles pourraient reprendre si elles n’étaient pas sans cesse perturbées par les parlementaires. Une série de dépôts d’amendements pourraient remettre en cause la liberté d’installation. Arnaud Robinet, actuel président de la FHF se dit opposé à la coercition. La loi prétend « simplifier » les multiples niveaux d’organisation locale de la santé, et propose d’investir les territoires de santé en redéfinissant leurs frontières, qui vont se superposer avec les frontières déjà existantes (frontières administratives, territoires de CPTS, de CLS, de CTS etc…). De plus, cette PPL donne tout pouvoir au CTS au sein duquel il existe une hiérarchie des pouvoirs et où les professionnels de santé de terrain ne sont que peu représentés car déjà très sollicités par leurs activités cliniques et les multiples échelons de l’organisation locale de santé.

La médecine de ville : le règlement arbitral, et après ?

Le refus unanime des syndicats médicaux d’un contrat d’engagement territorial qui laissait 70% des médecins sur la touche a empêché la signature de la Convention. L’arrêté du 28 avril 2023 portant approbation du règlement arbitral organise les rapports entre les médecins libéraux et l’assurance maladie. Voir sur Ameli.fr.

Extraits du règlement arbitral : Article 4 : par dérogation aux tarifs fixés par la convention, les actes suivants sont revalorisés de 1,50 € (1,80 € pour les DROM) :

  • L’avis ponctuel de consultant, facturé APC (ou APV), APY (ou AVY) ;
  • Les consultations complexes ou spécifiques suivantes : CCX, CDE, CCP, COE mais elles ne concernent pas les MPR
  • La majoration (MPC) de la CS et la majoration (MPC) de la CNPSY pour les neurologues, neuropsychiatres et psychiatres, la majoration de coordination cardiologues MCC ;
  • La consultation/visite de référence des médecins généralistes (G, GS, VG, VGS) via la revalorisation de la MMG ;
  • La majoration spécifique NFP des pédiatres pour la prise en charge des enfants de 0 à 2 ans.

Notons que les APU et les CS très complexes ne sont pas revalorisés.

L’augmentation de 1,50€ qui ne s’applique pas avant 6 mois, ne comble pas l’inflation. L’écart entre certaines spécialités médicales (pédiatrie, psychiatrie, MPR, endocrinologie…) se creuse alors que ces spécialités sont indispensables à la réponse aux besoins territoriaux.

Vers des équipes de soins spécialisées

Les Equipes de Soins Spécialisées (ESS) sont destinées à structurer et rendre lisible l’organisation ambulatoire des spécialités autres que la médecine générale, ainsi que les relations avec les acteurs de proximité. Elles devront s’appuyer sur la réalité existante des cabinets libéraux qui ont déjà développé des relations avec certains partenaires médicaux et paramédicaux. Les ESS seront appelées à améliorer l’accès aux soins et à constituer un maillage territorial pour répondre aux besoins pressants de la population. Les ESS pourraient être le support de financements spéciaux pour des programmes de soins difficiles à mettre actuellement en œuvre dans le contexte de la médecine libérale. L’engagement dans la constitution des ESS serait un moyen pertinent d’opposer à la contrainte individuelle des « Contrats d’engagement territoriaux » que la CNAM voulait imposer, une construction collective et dynamisante.

Il faut rétablir l’attractivité du métier de spécialiste MPR en secteur libéral comme en établissements en reconnaissant pleinement sa contribution au système de santé français. Il convient de valoriser équitablement l’expertise et le travail en équipe dans la perspective d’une réponse territoriale de recours en MPR.

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