Lettre d’information du SYFMER de mai 2019 – Adhérer au SYFMER

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  1. Nouveau site du SYFMER

Le nouveau site du SYFMER est en ligne. Il est en accès libre, sans code. Une newsletter mensuelle sera adressée à toute la liste MPR dont nous disposons avec une possibilité de désinscription simple. Les adhérents au SYFMER, qui ont manifesté un intérêt plus affirmé pour l’action syndicale, bénéficieront d’informations plus régulières par mail sur tous les sujets concernant les établissements ou l’activité libérale. Toutes les suggestions sont les bienvenues.

  1. Réforme du statut des praticiens hospitaliers : l’autonomie en question

L’article 6 du projet de loi de transformation du système de santé voté par l’Assemblée Nationale habilite le gouvernement à prendre par voie d’ordonnance des mesures visant à la création d’un statut unique de praticien hospitalier.

Cet article « réforme les conditions de recours à l’emploi médical contractuel dans le cadre d’un nouveau contrat, se substituant à plusieurs formes existantes qui seront supprimées, afin de permettre aux établissements de disposer de modalités plus adaptées à leurs besoins de recrutement ». Il modifie profondément les modalités actuelles de recrutement des praticiens hospitaliers.

La suppression du concours de PH et de la nomination nationale ouvrirait la porte aux recrutements locaux, à la discrétion de la gouvernance de l’établissement. Les PH, ainsi aisément révocables, risqueraient de tomber sous influence de logiques gestionnaires à court terme, parfois en contradiction profonde avec nos objectifs médicaux pour les patients, notre responsabilité populationnelle et la possibilité de faire respecter la déontologie, in fine la qualité des soins au service des usagers.

En outre, cette mise sous tutelle de l’administration va à l’encontre des promesses de rééquilibrer une gouvernance qui a écarté les médecins de la gestion des équipes et des programmes de soins et qui a conduit à la désertification des hôpitaux, 30% des postes de médecins hospitaliers étant vacants.

Il paraît légitime de s’opposer avec l’ensemble des intersyndicales de PH à la disparition de toute épreuve de sélection avant l’accès au statut de praticien hospitalier et d’exiger le maintien d’une liste d’aptitude nationale, reposant sur un examen par un collège médical de la spécialité.

Le maintien d’une nomination nationale sur les postes de praticien hospitalier est une exigence absolue afin de garantir la qualité du recrutement et l’indépendance professionnelle, ainsi que la gestion des carrières par le Centre National de Gestion. Cela n’empêche en rien de favoriser dans les statuts une plus grande mobilité pour permettre, entre autres, une activité mixte ville – hôpital, pour une meilleure réponse aux nouveaux besoins territoriaux de médecine de réadaptation.

La concertation sur la modernisation du statut de praticien hospitalier vient de commencer dans le cadre d’un groupe de travail réuni par la DGOS. Les syndicats ont obtenu la promesse que la nomination des PH resterait nationale, mais leurs modalités de sélection restent à définir. Selon les annonces de la presse ce groupe doit rendre ses conclusions à la fin de ce semestre.

Un choc d’attractivité est indispensable. Il doit reposer sur la reconnaissance au travail dont la rémunération reste un élément fort, sur l’autonomie professionnelle indispensable à l’exercice pluriprofessionnel coordonné qui caractérise les équipes de MPR et la sur participation aux processus de décision. L’évolution des hôpitaux ne peut se concevoir que centrée sur des projets médicaux partagés, assurant aux usagers des parcours de santé accessibles, performants et sécurisés.

La plus grande vigilance s’impose sur la qualité de recrutement des futurs Praticiens Hospitaliers et le SYFMER reste prêt à la mobilisation, en lien avec les intersyndicales.

  1. Assistants médicaux : bonne idée ou subventions sous contrainte ?

Il est prévu de créer 4000 postes d’assistants médicaux dans le but de décharger les médecins de tâches qui peuvent être faites par d’autres. Le financement d’une partie des salaires sera soumis à contreparties en termes d’augmentation de la file active, d’indicateurs de qualité (ALD, patients âgés…). Plusieurs modèles sont à l’étude.

Les contours des missions et la formation de ces assistants, entre secrétariat et fonction soignante restent flous. Les missions sont les suivantes :

  • Tâches administratives,
  • Missions en lien avec la préparation et le déroulement de la consultation,
  • Missions en lien avec la préparation et la réalisation d’actes techniques,
  • Missions d’organisation et de coordination avec les autres acteurs de la santé.

Le débat porte sur l’extension des contrôles de la tutelle sur l’activité et celle des subventions sous contraintes au regard d’un modèle économique libéral soutenable qui permettrait aux médecins de financer les aides dont ils ont besoin.

Toutes les spécialités sont éligibles, mais sont moins prioritaires celles qui travaillent déjà avec des collaborateurs (ophtalmologistes, radiologues) où dont l’exercice est essentiellement salarié. L’exercice libéral de la MPR devra être pris en compte.

  1. Organisation territoriale : les formes ambiguës de l’exercice coordonné

Les négociations sur les CPTS se poursuivent avec le même dilemme entre d’une part une coordination « d’en bas », qui existe et émane des acteurs de terrain, mais est sans cesse freinée par les mécanismes de financement en silos et/ou de régulation, et d’autre part, la coordination « d’en haut » qui ne peut se faire que par la hiérarchie ou par les pseudo-marchés régulés à distance par les indicateurs et les incitatifs financiers. Conçus par la technostructure, chaque loi ajoute de nouveaux mécanismes de coordination sans évaluer ni mettre en cause les précédents ce qui aboutit à une accumulation ubuesque et incoordonnée des structures de coordination.

Dans le cadre de l’organisation territoriale des soins promue par la nouvelle loi, il vaut mieux participer aux nouvelles formes d’exercice coordonné, comme acteurs de parcours mieux intégrés, reliant les activités libérales, les hôpitaux de proximité, les centres de réadaptation, les GHT et le secteur médico-social, que d’en être exclus.

  1. Loi de santé : il faut promouvoir la santé fonctionnelle et la réadaptation

La « santé fonctionnelle » correspond aux dimensions de la santé décrites dans la CIF. Elle est mesurée par les épidémiologistes. Il s’agit non seulement de réduire la mortalité, la morbidité mais aussi les années de vie avec incapacité, en permettant aux personnes à risque de handicap de jouir pleinement de leurs de fonctions motrices, sensorielles, cognitives psychiques et mentales, d’optimiser les activités et la participation.

Dans tous les pays la stratégie de santé, étroitement liée aux politiques du handicap qui s’adresse à l’optimisation des fonctions et activités, est la réadaptation (rehabilitation en anglais). L’OMS, l’ONU, L’OCDE, la Convention Internationale des Droits des Personnes Handicapées font le constat de l’insuffisante structuration des politiques de réadaptation y compris dans les pays à haut revenus où elle est menacée par le rationnement des soins. L’appel à l’action Réadaptation 2030, ainsi que le rapport sur la réadaptation dans les systèmes de santé sont explicites à ce sujet.

La réadaptation ne se confond ni avec les soins au long cours, ni avec la compensation sociale, liés à un état de dépendance chronique, même si elle participe à leur mise en place par la réinsertion sociale, familiale, scolaire ou professionnelle. Elle doit se décliner sur le plan organisationnel et financier au niveau national, dans l’organisation territoriale des soins et dans des équipes de soins spécialisées et spécifiquement formées. Si la loi de santé prend acte du vieillissement, des polypathologie et maladies chroniques elle ne va pas jusqu’à prendre en compte cette dimension essentielle de la fonction pour que notre système de santé intègre en une démarche coordonnée l’optimisation du pronostic vital, du pronostic fonctionnel et du pronostic social.

Si les politiques de santé ne parviennent pas à promouvoir une logique de parcours de réadaptation en France, c’est que l’Etat ne sait réduire le cloisonnement entre soins et action sociale, à tous les niveaux de gouvernance. Entre modèle individuel et collectif du handicap, il peine à surmonter l’opposition sclérosée par l’idéologie et les coalitions d’intérêt entre logique de pertinence des soins, juste soin au juste coût fondé sur les preuves, du côté des politiques de santé et logique d’accessibilité généralisée fondée sur l’auto-détermination et l’égalité, du côté des politiques sociales. La réadaptation, au sens international ,s’est trouvée occultée entre une vision trop exclusivement curative du sanitaire, aggravée par un modèle de management par industrialisation de l’EBM, dénaturée par réduction aux principes de la « médecine parachute », et renforcé par le financement à la pathologie : la fonction ne compte pas, et une vision trop exclusivement sociale et politique de la production du handicap.

Il est urgent de promouvoir un modèle systémique du handicap, qui intègre les dimensions multiples du processus de production du handicap en favorisant l’accès aux soins polyvalents et spécialisés selon les stratégies fondamentales de santé l’OMS ; promotion de la santé, prévention, soins curatifs, réadaptation et soins palliatifs.

Encore un effort Monsieur le président !

Pas de MPR sans politiques publiques de réadaptation.
Pas de politiques publiques de réadaptation sans solidarité.

Encadré 1 : Définition européenne de la Médecine Physique et de Réadaptation (MPR)

La médecine physique et de réadaptation (MPR) est une spécialité médicale indépendante qui a pour objectifs l’optimisation des fonctions physiques et cognitives, des activités (incluant le comportement), de la participation (incluant la qualité de vie) et la modification des facteurs personnels et environnementaux. Elle est responsable de la prévention, du diagnostic, du traitement et du management de la réadaptation pour les personnes dont l’état de santé et les comorbidités sont susceptibles d’entraîner un handicap, à n’importe quel âge. (Traduction libre à valider)

« Physical and Rehabilitation Medicine (PRM) is an independent medical specialty concerned with the promotion of physical and cognitive functioning, activities (including behaviour), participation (including quality of life) and modifying personal and environmental factors. It is thus responsible for the prevention, diagnosis, treatment and rehabilitation management of people with disabling medical conditions and comorbidity across all ages. »

Encadré 2 : définition internationale de la réadaptation

Nous proposons la définition du rapport mondial sur le handicap de 2011 complétée par quelques indications du site de l’OMS :

La réadaptation est définie dans le rapport mondial sur le handicap (OMS, 2011) comme « un ensemble de mesures qui aident des personnes présentant ou susceptibles de présenter un handicap à atteindre et maintenir un fonctionnement optimal en interaction avec leur environnement ». Cet ensemble d’activités est considéré comme une fonction structurante des soins de santé pour les organisations internationales, ainsi que dans le système international des comptes de la santé.

La réadaptation désigne une vaste gamme d’activités dont le but est de permettre aux personnes handicapées ou à risque de handicap de jouir de manière optimale de leurs fonctions physiques, sensorielles, intellectuelles et sociales. Citons sans être exhaustif les soins médicaux de réadaptation, la kinésithérapie, l’aide psychologique, l’orthophonie, l’ergothérapie et les services de soutien professionnel. Les personnes handicapées ou à risque de handicap devraient avoir accès aux soins médicaux généraux, mais aussi à des services de réadaptation adaptés. Aux termes de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, les pays doivent veiller à ce que les personnes handicapées bénéficient de services de santé appropriés, y compris de soins de santé généraux et de services d’adaptation et de réadaptation, et ne subissent pas de discrimination dans la fourniture des soins de santé (articles 25 et 26) ».

 

Jean-Pascal Devailly, président du SYFMER, le 15 ami 2019

jpdevailly@gmail.com

https://www.syfmer.org/

La prochaine newsletter sera consacrée à la réforme de l’organisation et du financement des SSR.